Théorie et pratique de la propagande NS avant 1933
Conférence donnée le mardi 26 janvier 2010
Cycle : "Les dates qui ont changé la face du monde
par Paul CANONNE
Ancien maître de conférences à la faculté d'Etudes germaniques de Paris-IV Sorbonne
Jaquette de l’édition de 1925.
Photo en contre-plongée , regard inquisiteur.
Sous–entendu : et toi que fais-tu ?
Introduction
Le mot propagande est aujourd’hui un mot familier qui renvoie à la politique. Mais à l’origine, c’est une création de l’Église romaine qui, dans le cadre de la Contre Réforme, avait mis en place en 1622 une Congrégation pour la propagande de la foi, chargée de répandre la bonne parole catholique.
Le phénomène est en soi fort ancien et tous les détenteurs de pouvoir, pharaons, rois et empereurs, n’ont jamais manqué d’y recourir pour augmenter leur gloire et assurer leur pouvoir. Voir le Roi-Soleil, " à nul autre pareil " comme le dit sa devise, ou le sacre du soldat parvenu qu’était, de son propre aveu, Napoléon.
Mais avec la Révolution française, le pouvoir, en dépit du culte de l’Être suprême un moment institué, ne vient plus d’en haut comme au temps de la monarchie de droit divin, mais d’en bas, par la volonté du peuple souverain.
Comme le dit Gustave Le Bon dans sa Psychologie des foules : Le droit divin des foules remplace le droit divin des rois [ p.3].
Gagner la faveur des foules, de l’opinion publique est donc, en démocratie, la condition de l’accès au pouvoir et de sa conservation. Et dans une situation de guerre une condition de la victoire.
Pour l’ancien combattant du front qu’était Hitler pendant la Première Guerre mondiale, la nécessité de la propagande était une évidence et il allait la mettre en pratique avec le succès que l’on sait.
Son bref séjour de quatorze mois en prison après l’échec de son putsch à Munich en 1923 allait lui fournir le temps de la réflexion. Dans le pavé de plus de 700 pages qui en est sorti sous le titre de Mein Kampf, il a longuement expliqué en quoi consisterait son système de propagande et sur ce point tout au moins on peut le considérer comme fiable.
Le " livre du führer " ne connaît avant 1930 qu’un succès relatif de 30 000 exemplaires. Après la prise du pouvoir, il deviendra la Bible du national-socialisme et sera lecture obligatoire et vendu à plus de douze millions d’exemplaires sans compter les traductions, tout en restant peu lu parce que plutôt mal écrit et passablement indigeste. Quoi qu’il en soit il devient lui aussi un instrument de propagande.
La semaine du livre allemand – Zent DR –
En ce temps-là, je lisais énormément et à fond.
En quelques années, je me suis donné alors les bases d’un savoir dont je profite encore aujourd’hui. AH.
( Ni lieu, ni date.)
Page de garde MK (éd.1942)
Pour le couple des jeunes mariés – avec les meilleurs vœux – pour un mariage heureux et béni –
remis par Le Bureau de l’état-civil – le – l’Officier d’état-civil.
(béni : remplace la Bible que le pasteur remettait aux jeunes mariés à la fin de la cérémonie : tentative de récupération)
Photo de mariage -Zent DR ? - Sans lieu ni date.
Donald Duck lit Mein Kampf – DR Lex 598 –
Bande dessinée américaine contre Hitler. Sans date.
Les années d’apprentissage
Les bonnes lectures
D’abord, il a eu des modèles théoriques, outre ceux qu’il se reconnaît, dans ses Conversations avec Rauschning, qui ne sont peut-être pas une source tout à fait fiable, en disant :
Toujours est-il que j’ai beaucoup appris de mes adversaires. J’ai étudié la technique révolutionnaire chez Lénine, Trotzki et d’autres marxistes. Et l’église catholique comme les Francs maçons m’ont ouvert des horizons que je n’aurais pu trouver nulle part ailleurs. [ 225 ]
On sait qu’il avait lu des ouvrages comme La Psychologie des foules de Gustave Le Bon, parue en 1895, qu’il paraphrase parfois presque mot à mot ou The group mind de Mac Dougall, l'un des fondateurs américains de la psychosociologie au début du 20è siècle. Mais Hitler est un autodidacte et avant tout un pragmatique dont l’expérience pratique est le principal maître.
Les trois leçons du terrain sont donc déterminantes :
Vienne est la première. Elle lui fournit l’occasion d’observer les pratiques des marxistes, dont les défilés l’impressionnent beaucoup.
MK 45 : Il m’a fallu moins de deux ans pour avoir une vue claire de la doctrine de la social-démocratie et de ses techniques. […] C’est une tactique élaborée en calculant exactement toutes les faiblesses humaines et qui a pour résultat assuré de conduire presque automatiquement au succès. […]
Karl Lueger, le chef du parti Social-Chrétien autrichien, lui montre qu’il faut faire porter l’effort sur la conquête de couches sociales dont l’existence est menacée et se servir de tous les moyens déjà en place en faveur se son propre mouvement. [ MK108-9] Il lui reconnaît même une certaine virtuosité dans l’art de la propagande [ MK 193 ].
La guerre de 14-18 est la seconde et semble décisive :
MK 193 : Ce n’est que pendant la guerre qu’on a pu voir à quels fantastiques résultats peut conduire une propagande bien utilisée [...] Mais c’est justement l’échec total de toutes les campagnes allemandes d’information […] qui m’a incité dès lors à m’occuper d’une manière bien plus approfondie du problème de la propagande […] L’enseignement pratique, c’est l’ennemi qui nous l’a donné, et malheureusement il ne l’a fait que trop bien.
Il est vrai d’ailleurs que les Alliés ont répandu des centaines d’affiches, que leurs avions ont lâché des milliers de tracts etc. Le responsable de la propagande britannique, Lord Northcliffe, était un aussi remarquable propagandiste que le sera plus tard Goebbels. Raison pour laquelle, après la guerre, on a vu paraître en Allemagne un flot d’ouvrages consacrés à cette question (cf. Arte en juillet 1994).
Dans ses Mémoires de guerre, Ludendorff aborde lui aussi le sujet et il est probable qu’iI en a parlé avec Hitler au moment du putsch. Or il y dénonce :
La responsabilité de la guerre, les atrocités belges, les mauvais traitements infligés aux prisonniers, notre immoralité politique, notre sournoiserie, notre hypocrisie et notre brutalité, l’arbitraire politique régnant dans une Allemagne prussienne, la mise en esclavage de notre peuple, étaient de puissants thèmes de propagande habilement inventés pour alimenter dans le monde entier la campagne de calomnies dirigée contre nous. […] Ils subjuguaient l’opinion publique du monde entier. C’est ainsi, par exemple, que pour les soldats américains la guerre se transforma en croisade contre nous. [ Kriegserinnerungen 1919,288-9 ]
Munich est sa troisième grande expérience, après la guerre.
Recruté dans un commando de renseignement de la Reichswehr, cette activité lui fournit l’occasion de découvrir son talent d’orateur
Le 12 septembre 1919, Hitler participe en tant qu’observateur de la Reichswehr à une réunion d’un nouveau groupuscule politique, le Parti ouvrier allemand ( DAP : Deutsche Arbeiterpartei. Il y a une quarantaine de participants. L’un de ceux-ci ayant pris parti pour la séparation de la Bavière et son union avec l’Autriche, Hitler, furieux, prend la parole et contre attaque avant une telle passion que Drexler, le fondateur du DAP, souffle à son voisin à la tribune : Ben dis donc, il a un de ces bagouts celui-là, il pourrait nous être utile. [Fest 171 ] ( Mensch, der hat a Gosch’n, den kunnt ma braucha – bagout vient de goule = gueule ). C’est donc ce talent d’orateur qui attire l’attention des fondateurs du Parti ouvrier allemand ( DAP ), cellule originelle du NSDAP.
Un témoin rapporte :
On avait le sentiment étrange que l’excitation de ses auditeurs était son œuvre et que celle-ci en même temps lui donnait d’autant plus de voix. [Deuerlein 85]
Un mois plus tard, lors de la première grande réunion publique du DAP, son succès lui fait prendre conscience de son talent :
MK 390-91 : J’avais déjà parlé pendant trente minutes et ce que j’avais déjà senti auparavant sans en avoir le moins du monde conscience se trouvait maintenant confirmé par l’expérience : J’avais un talent d’orateur ! Au bout de trente minutes, les gens dans cette petite salle étaient comme électrisés et leur enthousiasme se manifesta tout d’abord par le fait que mon appel à la générosité de l’assistance nous rapporta 300 marks de dons.
Devenu membre du DAP, Hitler décide donc d’y prendre la direction de la propagande :
MK 649 Pour le moment, ce domaine me semblait être le plus important, dit-il dans le Chapitre XI - Propagande et organisation. Le succès est au rendez-vous dès avril 1923 avec la grande manifestation au Cirque Krone.
Manifestation au cirque Krone
Photo de Hoffmann -BZDG 2-562
Mais ce succès ne tient pas qu’à son talent. Car ce talent, il le travaille devant la glace et Hoffmann, son photographe personnel, chez qui il fait la connaissance d’Eva Braun, en fait des photos.
Hoffmann 1925 – Hist.image - Hitlers Rednerposen
Dans ses débuts, il apparaissait en vedette américaine. Donc, après un ou deux orateurs de moindre importance, il attendait dans les coulisses le moment favorable qu’on venait lui indiquer.
Un proche de la suite d’Hitler, hélas pas nommé dans un document non daté, témoigne :Il faut avoir vu du haut de la tribune de l’orateur ces auditrices, le regard mouillé et voilé par les larmes, chaviré et extatique, pour ne pas avoir de doute quant à la nature de cet enthousiasme. [ TB einer Wende, 17 ]
Aujourd’hui, même pour un germanophone, ses éructations sont difficilement supportables et son accent de faubourien viennois n’arrange rien, pas plus que ses gesticulations de tribun frisant parfois l’épilepsie [ Haffner – Geschichte eines Deutschen, 88 ].
Carl Zuckmeyer, voulant se rendre compte de quoi il retournait, assiste à l’automne 1923 à plusieurs meetings d’Hitler :
Je réussis à me placer tout près de la tribune et vis les postillons jaillir sous sa moustache. Pour nous, cet homme-là ressemblait à un derviche hurleur. Mais il savait susciter l’excitation de cette foule compacte entassée dans les volutes de fumée et l’odeur des saucisses et emporter son adhésion. Non par des arguments, toujours incontrôlables dans ces discours incendiaires, mais par le fanatisme qui l’animait, par les coups de gueule et les braillements criards, se mêlant au ton de profonde conviction du brave type, et surtout : par le martèlement assourdissant des répétitions proférées sur un rythme déterminé et contagieux. On sentait un entraînement maîtrisé dont l’efficacité primitive et barbare faisait peur. [ Deuerlein 190 ]
Mais pour beaucoup de ses auditeurs, il en allait autrement à l’époque.
En 1937, dans les Cahiers pédagogiques du NS, un enseignant écrit :
Pendant toutes ces dernières années, c’est toujours le même sentiment que j’ai eu en entendant cette voix […] à chaque fois j’ai eu le sentiment que cette voix s’adressait directement à moi […] Là est la mission la plus profonde de cette voix – celle de nous donner la foi. [ Zent 303 ].
Et même un Français comme Jean-Jacques Servan-Schreiber note en 1938 :
En écoutant la voix rauque, profonde, pénétrante, hallucinante d’Adolf Hitler, dont on a gardé d’innombrables enregistrements, on comprend comment il prenait physiquement possession des êtres. Les yeux d’Hitler, c’est encore autre chose. Il faut les avoir vus – et avoir éprouvé pour mon propre compte ce magnétisme, me permit de découvrir très jeune le monde de l’irrationnel.
Les yeux d’Hitler – cartes postales d’époque – Calvinedu. ? -
Nécessité de la propagande
À cette expérience s’ajoutent rapidement les circonstances qui font de la propagande une nécessité, comme le note en 1931 un membre du parti dans une lettre adressée à la direction :
Nos adversaires disposant du pouvoir étatique et politique et pouvant nous contraindre par la force à respecter les lois, nous n’avons d’autre possibilité que celle de la lutte idéologique pour imposer en Allemagne un ordre nouveau en nous appuyant sur l’opinion populaire. [ Deuerlein ? ]
Un rapprochement inattendu avec Bismarck complète l’éclairage.
Dans un propos de table au château de Ferrières le 28 septembre 1870, Bismarck explique :
[…] Les Français forment une masse qu’il est facile de rassembler sous un même mot d’ordre et qui donne alors l’impression d’une grande force. Chez nous, chacun a son avis. Mais si un jour cet avis est partagé par un grand nombre, alors on pourra faire beaucoup de choses avec les Allemands. Et si tous avaient le même, alors ils seraient tout-puissants. [ WBG ]
Le but de la lutte idéologique, autrement dit de la manipulation de l’opinion publique, est donc clair :
MK 653 . Lorsque la propagande est parvenue à remplir un peuple tout entier avec une idée, il suffit à l’organisation de disposer d’une poignée d’hommes pour en tirer les conséquences.
Le Bon 90: […] n’oublions pas qu’avec la puissance actuelle des foules, si une seule opinion pouvait acquérir assez de prestige pour s’imposer, elle serait bientôt revêtue d’un pouvoir tellement tyrannique que tout devrait aussitôt plier devant elle.
Ce n’est que lorsque ces deux conditions sont remplies – d’un côté un groupe de militants décidés et rigoureusement organisés et de l’autre un soutien au moins passif de l’opinion publique – qu’une tentative de putsch a toutes les chances de devenir un coup d’État ayant une apparence de légalité. 1933 en est l’illustration.
Cette lutte idéologique est d’autant plus nécessaire que Hitler a tiré les leçons de l’échec du putsch de 1923 : il choisit la voie de la légalité. Bien entendu sans changer d’objectif.
Après la victoire des Nazis aux élections de septembre 1930, à l’occasion d’un procès contre des officiers pronazis de la Reichswehr à Ulm où il est cité comme témoin, il répond au président du tribunal qui lui demande s'il voit la mise en place du troisième Reich par les voies légales :
La Constitution ne définit que le terrain de la lutte, mais nullement son but. En entrant dans les institutions légales, nous ferons ainsi de notre parti un facteur décisif. Mais il est vrai que le jour où nous disposerons des droits que nous donne la Constitution, nous coulerons l’État dans la forme que nous considérons comme la bonne.[Deuerlein]
Il ne change donc rien à sa tactique.
Un bon témoin de l’époque, Ernst von Salomon, ancien membre des Corps francs mais pas nazi, décrit ainsi dans son gros livre Le Questionnaire ce qu’on pourrait appeler la sainte trinité de l’organisation, de la terreur et de la propagande :
Salomon Fragebogen 345 : Tout le reste était resté identique : la force de l’attaque, les grandes orgues des discours, l’activité proprement surhumaine, la rigueur dans l’organisation, la terreur dans les meetings avec tout leur bataclan – drapeaux, étendards, les " Heill " et les " Heil Hitler " - les ceinturons, les bottes et les chemises brunes en plus… […] Partout s’étalaient les drapeaux de son parti, partout on voyait le salut par lequel ses partisans se reconnaissaient, avec ce geste qui, par l’effort appuyé qu’il demandait, indiquait immédiatement leur engagement, et partout aussi on entendait leur cri de ralliement Heil Hitler ! Jamais encore un homme n’avait eu l’audace d’inclure son propre nom dans la relation la plus personnelle, celle du bonjour que l’on se donne.
Notons en passant que, son père étant l’enfant naturel d’une madame Schicklgruber, il aurait dû hériter de ce nom, si celle-ci n’avait ensuite épousé un certain Hiedler qui l’a adopté et lui a donné le nom de Hitler. [ Kerschaw 31.ff ] Heureusement pour lui, car Heil Schicklgruber aurait carrément fait rire.
Les sept règles d’or de la propagande de masse
Premier commandement : la propagande doit attirer l’attention générale sur le mouvement.
MK 544 : Peu importe qu’ils se moquent de nous ou qu’ils disent du mal de nous, qu’ils nous fassent passer pour des clowns ou pour des criminels, l’essentiel est qu’ils parlent de nous, qu’ils ne cessent pas de s’occuper de nous et que nous devenions progressivement aux yeux des travailleurs eux-mêmes la seule force avec laquelle il y a réellement un débat.
Et c’est bien comme un colporteur ou un histrion que la caricature le représente avant les années trente :
Hier encore sur ses grands chevaux - Simpl août 1925 -
Douze marks qu’il coûte ce petit bouquin ? Un peu cher, monsieur mon voisin…Vous n’auriez pas des allumettes ?
( scène de brasserie – chiens méfiants – Hitler en colporteur obséquieux essayant de placer son MK )
Hitler, poète lyrique - Simpl janvier 28 -
Hitler n’avait pas de mauvaises intentions. Il n’a jamais été qu’un poète lyrique.
( Croix gammée inversêe = critique . Hitler sur scène avec public béat – couronne de lauriers – luth )
Le mot est du député SPD Wilhelm Hoegner, le porte-parole de la minorité de la commission socialiste du Landtag de Bavière chargée d’enquêter sur les événements de novembre 1923, laquelle s’efforce de dédramatiser :
Alors en Bavière, il ne s’est rien passé. Jamais il ne s’y est produit de catastrophe judiciaire et étatique. Monsieur von Lossow a toujours été un brave garçon. Monsieur von Kahr est un républicain honteusement méconnu […] Hitler n’avait pas de mauvaises intentions. Il n’a jamais été qu’un poète lyrique. [Deuerlein 292]
Conséquence : d’abord on n’a pas pris le programme de février 1920 au sérieux. Dans un rapport sur le programme du parti nazi que lui demande la chancellerie à la veille des élections de septembre 1930, un jeune député libéral, Theodor Heuß, futur premier président de la RFA le tourne en ridicule en en relevant les incohérences et les contradictions et conclue qu’on ne saurait le prendre au sérieux.
Mais avant cette percée fatale qui amène 107 députés nazis au Reichstag, on ne prend pas Hitler au sérieux non plus. Ainsi, après son putsch raté, lors d’une réunion au ministère de l’Intérieur de Bavière pour discuter de son extradition éventuelle, possible puisqu’il est apatride, on entend les propos suivants, comme le rapporte Ernst Niekisch, l’un des dirigeants socialistes en Bavière :
[ Le ministre ] envisage d’extrader Hitler. Tous les représentants des partis bourgeois partageaient les griefs du ministre et en conclurent que cette extradition était souhaitable. Seul [ le chef du SPD en Bavière ] s’y opposa, arguant des principes de la démocratie et de la liberté : si on voulait les prendre au sérieux, on ne pouvait pas prendre une telle mesure. Hitler n’était en fin de compte qu’un personnage comique ( eine komische Figur ) et il serait facile aux travailleurs de le renvoyer à l’insignifiance dont il était sorti peu de temps auparavant. […] Et c’est ainsi que la décision ne fut pas prise. [ HLB 14-33, 227 ]
En avril 1927, le Simpl publie une caricature intitulée Cirque Munichois.
A gauche, Adolphe fait son numéro de tribun, à droite, Auguste son numéro de clown.
Dans les deux cas, le public et sa réaction sont les mêmes…
Une symbolique spécifique
Ce premier commandement implique que le mouvement se donne une symbolique spécifique et immédiatement identifiable. Par exemple par le choix de couleurs dominantes :
MK 542 : C’est après avoir réfléchi avec le plus grand soin et à fond ( sic ! ) que nous avons choisi pour nos affiches la couleur rouge : pour provoquer la gauche, pour susciter son indignation et la pousser à venir dans nos meetings, ne serait-ce que pour les perturber.
Et puis au début l’argent manquait pour s’offrir des affiches dessinées qui attirent l’oeil. Alors on faisait des affiches-textes, mais sur fond rouge. Ainsi du programme du parti en février 1920 peu lisible sur la photo, mais on trouve le texte sans difficulté et on dira un mot du contenu tout à l’heure, à propos du qualificatif national-socialiste, encore peu mis en valeur sur cette affiche.
Deuxième exemple d’affiche-texte sur fond rouge, celle-là de 1931, où figure la tristement célèbre comparaison entre la puce et le Juif.
LE JUIF AUSSI EST UN ÊTRE HUMAIN !
Voilà les affabulations de l'apparatchik rouge quand par hasard il est contraint de s'exprimer sur la question juive, autour de laquelle il ne cesse de tourner comme le chat pour tirer les marrons du feu.
Qui en a jamais douté ?
LA PUCE AUSSI EST UN ANIMAL !
mais assurément pas un animal agréable,
tout comme le Juif n'est pas un être humain agréable
et de même que nous ne conservons ni ne protégeons la puce,
parce qu'elle nous mord, nous pique et nous suce le sang,
nous ne conservons et protégeons pas plus le Juif
car il nous mord et nous pique et que, pareil à un vampire, il suce jusqu'à la dernière goutte de sang de nos veines.
Le choix de l’étendard nazi en découle également et illustre comment on récupère en sa faveur une symbolique préexistante que l’on détourne de son sens premier.
Comme Hitler l’explique lui-même :
MK 557 : En tant que nationaux-socialistes, nous exprimons notre programme dans notre drapeau. Le rouge, c’est l’idée sociale, le blanc l’idée nationale et la croix gammée la mission du combat pour la victoire de l’homme aryen et du même coup la victoire de la notion de travail créateur, qui, par elle-même, a toujours été et sera toujours antisémite.
Les couleurs noir-blanc-rouge
Par ailleurs, les couleurs noir-blanc-rouge sont celles de l’empire bismarcko-wilhelminien, donc les couleurs traditionnelles qui synthétisent celles de la Prusse – noir-blanc – et celles de la Hanse – rouge-blanc, ou si l’on veut la puissance militaire de la Prusse et la puissance commerciale de la Hanse…
Garder ces couleurs, c’était rappeler la grandeur impériale et suggérer une continuité qui était un appel du pied à la droite nationale conservatrice, appel qui semblait même laisser la porte entr’ouverte à un éventuel retour de la monarchie.
Lors du Congrès du parti à Salzbourg en août 1920, le drapeau nazi devient son drapeau officiel, en 1933 celui de l’État, à côté du drapeau noir-blanc-rouge qu’on garde un temps pour ménager les nationaux conservateurs, mais en septembre 1935 il en devient le seul. [DTVLex polit.Symbole 111 ff.]
Le drapeau était d’ailleurs devenu un objet de culte, en premier lieu celui, taché de sang du putsch raté du 9 novembre et sur lequel on prêtait serment. Celui des unités des SA portait l’inscription Deutschland erwache ( Allemagne, réveille-toi ), première moitié du slogan bien connu dont la deuxième moitié était Juda verrecke ( Juda crève ), laquelle venait automatiquement à l’esprit quand on voyait ou entendait la première.
Enfin le refrain du plus connu des chants de la jeunesse hitlérienne commençait par : Unsere Fahne flattert uns voran, et se terminait sur les mots : ja, die Fahne ist mehr als der Tod ? [ Georg Walther Heyer – Die Fahne ist mehr asls der Tod –Heyne TB 5890 ]
Blutfahne ( drapeau du sang ) - Photo tirée d’un album d’époque.
En achetant certaines cigarettes, on pouvait collectionner des points,
obtenir des photos qu’on collait ensuite dans un album ad hoc à acheter, un Zigarettenbilderalbum.
On voit Hitler faisant prêter serment sur le drapeau du sang du 9 novembre.
( Blutfahne ZBA – SA-Standarte DHM LeMo)
Sur le drapeau des unités de la SA ( les premières en mars 1923 à Munich ), on lit :
Deutschland erwache – Allemagne réveille-toi, première moitié du slogan.
Couronne de lauriers et de feuilles de chêne entrelacées entourant le svastika et surmontée de l’aigle.
En dessous, le nom de la section concernée, ici Berlin, et le drapeau.
Croix gammée (le swastika )
En fait, l’idée aurait été reprise d’un membre du groupe de Starnberg, dont la croix gammée tournait à gauche. Alors que sur le drapeau nazi, elle tourne vers la droite. L’effet n’est pas du tout le même. Sénestrogyre, elle semble prendre la fuite, dextrogyre elle semble partir à l’assaut.
Mais elle n’avait rien de nouveau : c’est un très vieux symbole qu’on trouve assez fréquemment aux Indes. Le nom de svastika ou swastika vient du sanskrit et signifie " de bon augure " (Robert). On le trouve aussi aujourd’hui encore en Chine et au Japon ( où il est sénestrogyre ) et même dans les forces armées de la Finlande où il remonte à une tradition bien antérieure ! Par ailleurs, avec des branches légèrement recourbées vers l’intérieur il était dans la mythologie germanique le symbole du soleil et de la lumière.
Céramique peinte – Suse vers 3500-3000 av.JC
Volkoff 44
Afiiche électorale de la Vereinigte völkische Liste - 1924
( liste ethniste unie ) - BAK
Remis à la mode vers la fin du 19è siècle par les pangermanistes, les courants " völkisch " c’est-à dire en principe ethnistes mais finalement racistes et donc antisémites et les sociétés plus ou moins secrètes comme la Société de Thulé crée en 1919, il ornait les casques de la Brigade de Marine Erhardt et ceux des partisans de Kapp lors de son putsch en mars 1920. Hitler l’a probablement connue par ce biais, à moins que ce ne soit, comme le rapporte Henry Picker, lors de son passage à l'école du monastère dont elle ornait les armes ainsi que la chaire.
Thule Gellschaft 1919 - Wikipedia
Sa polysémie symbolique, son parfum d’orientalisme, son aura de mystère occultiste et last but not least son lien avec la mythologie germanique en faisaient une aubaine qu’Hitler ne pouvait pas ne pas saisir.
La croix gammée était en outre optiquement très frappante et facile à dessiner sur n’importe quel support : les murs bien sûr, mais aussi des coussins, des épingles de cravate, des autocollants. On en voyait partout dans Berlin et elles faisaient l’effet d’un avertissement, voir d’une menace. Même sur une mauvaise photo d’un panneau d’affiches électorales ( Mannheim 1932 – DHM LeMo ), elles sautent tout de suite à l’œil.
Entre adversaires politiques, la concurrence symbolique était permanente. Mais il était difficile de neutraliser l’effet de la croix gammée. Les quelques contre-mesures prises par la gauche en sont l’illustration. En 1931, sur le conseil de Tchakotine, on les raye avec trois flèches symbolisant l’union entre le parti socialiste, les syndicats et l’organisation paramilitaire socialiste du Reichsbanner ( Bannière d’Empire ). Ou bien, avec quelques traits supplémentaires on la transforme en caricature de Hitler. Les nuits étaient chaudes, mais le plus souvent la croix gammée avait le dessus.
Affiche SPD contre la SA 1932 – Polit.Ansch. 74 - Voilà la vérité !
( Des SA tirent sur un camion du Reichsbanner )
Libérez la patrie de ce parti à croix gammée – Votez social-démocrate
Le Front de Fer fait une manif. à Berlin en 1932 - Brodersen 189 -.
Drapeau nazi barré des trois flèches.
Le travailleur dans l’empire de la croix gammée –
Affiche électorale du SPD 31.7.32 – Polit.Ansch. 77
Hitlerfratze – Volkoff 43 et Zent.DR
Le changement de nom du parti
Autre trouvaille décisive d’Hitler : le changement du nom de l’insignifiant Parti ouvrier allemand, DAP, en NSDAP, Parti national-socialiste allemand, comme on l’appelle en français – mais à tort. En effet le mot composé allemand Nationalsozialismus se comprend et doit se traduire, comme tous les mots composés allemands, en commençant par le deuxième terme.
National-socialisme n’est donc pas une traduction, mais un décalque qu’on a conservé depuis les débuts du mouvement. La traduction est : socialisme national…. Mais les Français sont fâchés avec les langues en général et avec l’allemand en particulier.
Or la traduction exacte montre clairement en quoi consiste l’idée géniale du führer - à moins que ce ne soit un tour de passe-passe. Entre les trois grands courants politiques du 19è siècle, le libéralisme, le nationalisme et le socialisme, la notion même de führer excluait toute référence au premier. Quant aux deux autres, ils étaient depuis longtemps rivaux sinon adversaires : Bismarck puis Guillaume II avaient obstinément combattu le parti socialiste, qui n’était devenu le premier parti du Reichstag qu’aux élections de 1912. Alors que faire ?
En bonne dialectique, résoudre la contradiction en la dépassant, donc en faisant une synthèse, et, les choses étant ce qu’elles étaient après 14-18, en plaçant en tête le socialisme ( deuxième partie du mot composé ). C’était la meilleure formule pour ratisser large. Quant à savoir ce que Hitler en pensait vraiment, c’est une autre affaire. La réponse est sans doute dans la prééminence de la croix gammée omniprésente, symbole du racisme et de l’antisémitisme. Comme Hitler le dit lui-même. Mais il oublie de dire que Friederich Naumann, devenu après la guerre député au Reichstag, avait, dès 1896, fondé une Union Sociale Nationale défendant une évolution sociale et démocratique de l'Etat.
Du reste, si on veut comprendre ce que veut réellement ce programme, il suffit de répartir ses vingt-cinq points sur deux colonnes, une pour le socialisme et une autre pour le nationalisme. On s’aperçoit alors que la majorité des vingt-cinq points ne relève ni du socialisme ni du nationalisme. Le reste, qui est donc l’essentiel, annonce un régime centralisé autoritaire prenant le contrôle de l’opinion et radicalement antisémite. Radical est du reste, avec diverses variantes, le mot-clé de ce programme et en trahit le fanatisme. Tour de passe-passe ?
Cette volonté permanente de récupérer et de détourner les mots et les symboles, le propagandiste communiste Willi Münzenberg la relève dans son livre L’arme de la propagande en écrivant :
Cette appropriation se manifestait jusque dans les plus petits détails, toujours avec l’intention de faire illusion aux militants et de leur imposer ce mensonge que la propagande hitlérienne avait créé ces symboles, ou du moins leur avait, la première, donné, leur véritable signification. On reprend non seulement les airs et les chants des travailleurs, mais aussi, avec de légères modifications qui changent tout, leurs paroles. [ p.234 ]
Le portrait du führer
Il est bien entendu omniprésent. À la maison, il prend place à côté de ceux de Luther, de Goethe et de Bismarck et peut faire l’objet d’une véritable culte privé comme le montre cette photographie, sans lieu ni date, indiquant simplement qu’il s’agirait de la fête des récoltes qui avait lieu le dimanche suivant la Saint Michel surtout dans les régions protestantes et qu’Hitler ne manquera pas de récupérer.
On le cache dans son cartable, sous son matelas, on le colle au revers d’une porte de l’armoire de la salle de classe. Hitler devient un invité muet et même si son nom n’est pas prononcé, il devient ainsi la mesure de toute chose : national-socialisme et, au choix, église, marxisme, psychanalyse, etc.., font l’objet de débats sans fin.
Le national-socialisme est devenu l’idéologie dominante, comme le relève Salomon :
Fragebogen 183 : Et dans toute discussion, il s’avérait qu’il y avait là quelqu’un, un invité muet et qui le plus souvent demeurait invisible, mais qui dominait la discussion parce qu’il en donnait les thèmes, en prescrivait la méthode et en fixait la direction. Et cet invité muet, c’était Adolf Hitler.
Bien évidemment, les scandales de la vie politique, les campagnes électorales, les nationales plus encore que les régionales, fournissaient l’occasion de déferlements de propagande. Du coup, la possibilité de référendums d’initiative populaire introduite par la constitution de Weimar pour prévenir d’éventuels excès de pouvoir de l’exécutif, se retourna contre la République. Sur les sept qui furent tentés, trois conduisirent à un scrutin national, finalement négatif. En 1926 à l’initiative des socialistes, celui pour la confiscation des fortunes des princes. En 1928, à l’initiative des communistes, celui contre la construction d’un cuirassé et, en 1929, celui lancé par la droite nationale contre l’acceptation du plan Young sur l’étalement du paiement des réparations dues par l’Allemagne – jusqu’en 1988 !
Référendum plan Young 1929 – Polit.Anschl. 64 –
Pour un référendum d’initiative populaire. NSDAP et DNVP recueillent 4 millions de signatures.
Mais perdent largement le scrutin final.
Le texte dit : Jusqu’à la troisième génération, vous serez de corvée obligatoire !
Sur la bande oblique collée :
Défendez-vous – Allez au référendum d’initiative populaire.
Inscrivez-vous sur les listes du RIP mises à disposition du 16 au 29 octobre.
Comme le dit, une fois encore Salomon dans son Questionnaire :
Le drame du système de Weimar, c’est que c’est le droit qui l’a perdu [184]
Et sur l’usage systématique de cet abus de droit, la déclaration de Goebbels après son élection au Reichstag en 1928 ne laisse planer aucun doute :
Nous entrons au Reichstag pour nous fournir dans l’arsenal des armes de la démocratie. Nous devenons députés au Reichstag pour paralyser le système de Weimar avec son propre soutien. Si la démocratie est assez bête pour nous payer de ce mauvais service en nous versant des indemnités et en nous donnant des titres de transport gratuits, c’est son affaire et nous n’allons pas nous casser la tête là-dessus. Tout moyen légal nous est bon pour révolutionner l’état actuel des choses. […] C’est pour faire le ménage que nous venons. […] Nous ne venons pas en amis, ni en observateurs neutres, c’est en ennemis que nous venons. Nous venons comme le loup dans le troupeau de moutons. [ Hist.Leseb. 14-33 – 295-97 ]
Deuxième commandement : La propagande ne doit encore et toujours ne s’adresser qu’à la masse
MK 197 : La tâche de la propagande, ce n’est pas de donner une formation scientifique à l’individu, mais d’attirer l’attention de la masse sur certains faits, certains événements, certaines nécessités, dont la signification doit ainsi trouver place dans son horizon.
Elle doit donc être adaptée à la masse sur laquelle Hitler porte un jugement qui reprend presque mot à mot celui de Le Bon.
Il affirme : que sa capacité de réception est très limitée ( MK 198 ), qu’elle a un caractère de femme et une sensibilité féminine ( MK 201 ), que c’est moins une réflexion objective qu’une sensation, un sentiment qui déterminent sa pensée et son action ( MK 201 ) et enfin qu’elle préfère celui qui s’impose à celui qui supplie et trouve plus de satisfaction dans une doctrine qui n’en tolère aucune autre à ses côtés que dans une pensée qui lui laisse libéralement sa liberté ( MK 44 ).
La foi étant par nature plus difficile à ébranler que le savoir, une propagande efficace doit donc ne prendre en compte que les sentiments et les pensées de la masse, à l’exclusion de toute autre considération (MK 198 ), être radicale et agir comme un coup de fouet ( MK 658 ), être populaire et régler son niveau sur la capacité de réception du plus borné de ceux auxquels elle a l’intention de s’adresser ( MK 197 ).
De cette conception – méprisante ou réaliste ? – découlent les trois autres commandements.
Troisième commandement : " seule la répétition inlassable des slogans est créatrice de réflexes "
MK 198 : Toute propagande efficace doit se limiter à un très petit nombre de points et les utiliser comme slogans aussi longtemps que nécessaire pour que même le dernier des derniers soit capable en l’entendant de se représenter ce que l‘on veut qu’il se représente.
C’est pourquoi il faut se concentrer sur un adversaire, les Juifs par exemple :
MK 129 : Faire apparaître comme appartenant à une seule et même catégorie des adversaires fort éloignés les uns des autres fait partie du génie d’un grand chef (Führer )
Ce qui permet de mettre Juifs, marxistes et capitalistes dans le même sac. Ce procédé de l’amalgame était du reste commun à l’extrême gauche et à l’extrême droite.
Une fois encore, Le Bon l’avait dit :
Le Bon 34 : Association de choses dissemblables n’ayant entre elles que des rapports apparents, généralisation immédiate de cas particuliers, telles sont les caractéristiques de la logique collective.
Voici deux affiches très réussies qui illustrent bien ce procédé.
Le tireur de ficelles 1924 – Polit Ansch. 45 -
Travailleurs de la tête et de la main.
Sur le collant rouge : bloc ethniste, encadré de deux croix gammées.
Gros Juif sournois et pansu, chaîne de gousset avec étoile de David et non montre de gousset.
Au fond, des usines. Au premier plan la masse des travailleurs.
L’ange gardien SPD liste 1 1932 ? - BAK -
Le marxisme est l’ange gardien du capitalisme.
Étoiles = croix gammées sur ciel ( bleu foncé ! )
Le socialiste, avec deux ailes, est presque nu, porte un gros gourdin et la casquette ballon rouge ( origine ? )
symbole de la social-démocratie ( depuis 1848 ?? ), avec faucille et marteau, pour les assimiler au communisme.
Il tient par la main un petit Juif pansu avec chaîne de gousset et haut de forme,
un sac de 1 000 000 ( de Reichsmarks ? ) à la main.
Complémentairement, chaque phase de la lutte pour le pouvoir sera simplifiée et dramatisée en la ramenant à une alternative du type ou bien / ou bien dont toute la suite dépend, ce qui présente en outre l’avantage de ne pas laisser au militant le temps de la réflexion.
Dans son Journal, Goebbels confirme ce principe en écrivant que l’essence même de la propagande est la simplicité et la répétition ( 29.1.42 ). En pratique cela a donné des slogans bien connus, comme :
Les Juifs sont (font) notre malheur ! Die Juden sind unser Unglück
Allemagne, réveille-toi, Juda crève ! Deutschland erwache, Juda verrecke
Chef commande, nous te suivrons ! Führer befiehl, wir folgen dir
Un peuple, un empire, un chef ! Ein Volk, ein Reich, ein Führer
Meeting au Sportpalast de Berlin s.d. – Zent.DR –
Les Juifs sont/font notre malheur –
En novembre 1879, l’historien national(iste) Heinrich Treitschke rapporte dans une revue prussienne que, en liaison avec l’agitation antisémite (de Stoecker ), on entend partout, même dans l’élite, exprimer la crainte devant l’afflux de Juifs fuyant l’Est, par l’expression : les Juifs sont/font notre malheur.[ Winkler I- 232]
Ein Volk, ein Reich, ein Führer – Anschluß avec date du référendum 13.3.38
Poli.t Ansch. et DHM LeMo.
Carte postale de propagande.
Et affiche, souvent dans les bureaux administratifs et dans les salles de classe.
En haut l’emblème de souveraineté de l’État Nazi : aigle stylisée et croix gammée entourée de feuilles de chêne.
Le Bon 60 : La puissance des mots est liée aux images qu’ils évoquent et tout à fait indépendante de leur signification réelle [...] La raison et les arguments ne sauraient lutter contre certains mots et certaines formules […] À certains mots s’attachent transitoirement certaines images : le mot n’est que le bouton d’appel qui les fait apparaître.
Une décennie après Le Bon, Pavlov découvrira le réflexe conditionné chez l’animal, avant de l’étendre à l’homme.
Ces slogans – le mot est d’origine gaëlique et signifie cri d‘un clan – doivent être brefs ( au plus une demi-douzaine de mots ), frappants ( Schlagwort ! ), convenir aussi bien à des calicots ou à des affichettes et surtout à la répétition en chœur dont le rythme s’impose ineffaçablement à la mémoire. A tel point que le rythme devient même plus important que le contenu.
( En français par exemple Algérie française et CRS-SS ont le même rythme : - - -/ /. Resterait à voir si ses rythme 3+2 ou le 2+2 de on a gagné sont liés au Français ou se retrouvent dans d’autres langues.)
Toujours est-il que, comme le dit Sauvy dans Le socialisme en liberté (1974 ²) :
Les techniques de la force s’apprennent plus facilement que la connaissance profonde d’une société d’hommes, ( connaissance ) plus facilement remplacée par les préjugés et des slogans, remarquables machines à ne pas penser.
C’est la machine à décerveler du Père Ubu.
Quatrième commandement : Une bonne propagande est fondamentalement subjective et partisane
MK 200 : [ la tâche de ] la propagande n’est pas de rechercher objectivement une vérité qui serait favorable aux autres pour ensuite, avec la sincérité du doctrinaire, la donner en pâture à la masse, mais de servir sans cesse sa propre vérité. […] On ne peut pas vendre une savonnette avec des affiches sur lesquelles on concéderait qu’il en existe d’autres de bonne qualité.
Pour la masse, la diversité contradictoire de la réalité n’engendre que confusion. Il ne faut donc jamais concéder ne serait-ce qu’un semblant de bon droit à celui qui vous fait face ( MK 200 ), ni donner à la propagande l’ouverture d’esprit qui est par exemple celle d’un enseignement scientifique ( MK 198 ), et surtout pas quand on a à faire au peuple allemand qui n’a que trop la manie de l’objectivité ( MK 201 ).
Il n’y a pas plus de place pour la contradiction dans la propagande des nazis que dans leurs meetings :
Le Bon 26 : La foule n’étant impressionnée que par les sentiments excessifs, l’orateur qui veut la séduire doit abuser des affirmations violentes. Exagérer, affirmer, répéter, ne jamais tenter de rien démontrer par raisonnement, sont les procédés d’argumentation familiers aux orateurs des réunions populaires.
Cinquième commandement : Le meilleur vecteur de la propagande, c’est la parole
MK 116 : Les plus grands bouleversements qui ont eu lieu dans ce monde n’ont jamais été amenés par la plume. […] La force qui a déclenché les grandes avalanches religieuses et politiques, ce n’a été de toute éternité que le pouvoir magique de la parole. La grande masse du peuple en particulier ne succombe jamais qu’à la puissance du discours.
Le Bon 59 : Maniés avec art [ les mots ] possèdent vraiment les puissances mystérieuses que leur attribuaient jadis les adeptes de la magie. Ils provoquent dans l’âme des multitudes les plus formidables tempêtes et savent aussi les calmer.
Hitler est convaincu que le succès de la Révolution française " est dû à une armée d’agitateurs conduite par des démagogues de grande classe ". Et que le succès de la Révolution russe est moins dû à la popularité toute relative des écrits marxistes qu’à l’activité de " milliers d’agitateurs qui peignaient dans leurs discours des lendemains resplendissants, mais au service d’une idée. "
Assurément, la découverte de son talent d’orateur par Hitler a là une influence décisive ainsi que l’entraînement systématique auquel il s’est astreint comme on l’a vu.
Aussi les nazis ont-il organisé des formations d’orateurs ( Frabogen 34 ), d’abord sous forme d’enseignement à distance, puis par des séminaires qui formèrent des centaines d’orateurs régionaux ou nationaux. Moins sans doute en les entraînant à l’art oratoire qu’en les instruisant de la façon de traiter des sujets idéologiques ou des actualités politiques. Certains furent spécialisés par exemple pour les questions agricoles, la situation des travailleurs ou encore les question économiques.
À partir de 1929, il y eut un répertoire des orateurs officiels du parti, qui comptait alors une centaine de noms, indiquant outre leur adresse, leur spécialité etc. [ Himmler – BAK ]
Une fois qu’ils ont eu des députés, donc dès 1924, ils ont mis en place leur propre service d’information où ces députés, en collaboration avec la direction de la propagande, préparaient des dossiers pour les orateurs.
En septembre 1930, lors la campagne pour les élections au Reichstag des milliers de meetings furent organisés ( voir le texte de la circulaire dans les documents annexes ) et des affiches célèbres produites, celle-ci par exemple qui joue sur le chômage.
Unsere letzte Hoffnung ( notre dernier espoir )
Affiche électorale de Mjölnir 1932 Polit.Ansch. 80
Pseudo du caricaturiste Hans Schweitzer, nazi dès 1920.
Mjölnir est le nom du marteau du dieu Thor dans la mythologie germanique.
Motif fréquent avec la hie ( masse – orig. néerl ) des terrassiers,
cette dernière utilisée aussi par les Spartakistes. Son nom est en haut à droite.
Premier plan : la masse croissante des chômeurs, près de 6 millions en 1932, auxquels Hitler promettait du pain et du travail.
Il y eut une centaine de meetings par jour, 3400 dans les dernières semaines et en quatre semaines Hitler en fit lui-même vingt. Le 10 septembre au Palais des sports à Berlin, on compta près de 16 000 personnes. Le 12 à Breslau, près de 30 000 plus cinq à six mille à l’extérieur de la salle où des haut-parleurs transmettaient la réunion.
Face à un tel activisme, les concurrents ne faisaient pas le poids, comme le relève Salomon :
Frabogen 348 : Les partis menèrent la campagne sans conviction. Seuls les nazis faisaient un meeting après l’autre. Les " orateurs du Reich ", jeunes et dynamiques, formés dans les écoles d’orateur du parti, savaient parfaitement, grâce à l’expérience acquise dans des milliers de meetings, ce qu’il convenait de dire et ils le disaient. Ils voyageaient de localité en localité, sans oublier le moindre village, et dans tous les endroits où il n’y avait pas encore de section du parti, ils venaient accompagnés par un cortège de SA, si bien que leur arrivée promettait d’entrée de jeu une certaine nouveauté agréable dans la vie paisible du village. Mais le dimanche, on avait l’impression que toutes les chemises brunes étaient sur les routes. De bon matin, ils partaient sur des camions en direction de la petite ville et, tard le soir, quand ils s’en retournaient, leurs chants de lutte retentissaient dans la nuit.
Il va de soi qu’un meeting avec Hitler était un sommet et que les responsables régionaux se battaient pour obtenir cet honneur. La lettre d’octobre 1923 écrite par une certaine Anna dont on ne sait rien, moins de trois semaines avant le putsch de Munich, sur la manifestation organisée pour Rossbach est un témoignage exceptionnel sur le déroulement d’un tel meeting et sur son effet ( voir texte distribué ). Il mérite une lecture attentive et mériterait un commentaire détaillé.
Faute de temps, on ne soulignera que les lignes 48-49 :
" Parfois j’en aurais presque l’impression qu’Hitler s’est emparé par un coup de baguette magique de toute cette confiance inconditionnelle que lui accordent jeunes et vieux. "
La magie est dans le " presque " ...
Sixième commandement : Pas de bonne propagande sans bonne mise en scène
L’orateur a l’avantage de percevoir instantanément la réaction de son public ce qui peut avoir une influence décisive sur son discours ( voir MK 525 ) On sait du reste que, du moins à ses débuts où il passait en vedette américaine, Hitler attendait dans les coulisses. On venait lui rendre compte de la montée de température du public et lorsqu’il pensait que le point de fusion était atteint, il entrait en scène ( voir lettre d’Anna : 13-34 la préparation et 35-37 l’entrée en scène ).
Otto Strasser, le frère de Gregor, décrit le phénomène ainsi :
Semblable à une fine membrane, cet homme a compris grâce à une intuition que ne remplace aucune faculté rationnelle, comment se faire le porte-parole des désirs les plus secrets, des instincts les plus déplaisants, des souffrances et de l’agitation intérieure d’un peuple […] Adolphe Hitler entre dans la salle. Il évalue l’atmosphère […] pendant quelques minutes, il tâtonne, il cherche et s’adapte. Puis tout à coup il se lance [… ] et ses paroles, jaillissant comme des flèches quand la corde de l’arc se détend, atteignent chacun à son point sensible. Il libère l’inconscient de la masse et dit ce que dans son cœur l’auditeur souhaite entendre. [ Hitler et moi, Constance 1948, p.85 ff – DDK 219 ]
À ce talent s’ajoute la prise en compte calculée du lieu, du moment et de la lumière. Il souligne qu’il faut éviter les salles froides et préférer ceux qui, comme l’église de la garnison à Potsdam, sont chargés d’histoire ou des lieux de convivialité comme les grandes brasseries munichoises ( lettre d’Anna 11 : Löwenbräukeller ).
Ayant constaté que ce genre de réunion ne marche pas bien le matin, il en conclut qu’elles doivent par principe avoir lieu le soir, en effet dit-il :
" Le soir, le libre-arbitre [ de l’auditoire ] se soumet plus facilement à une volonté supérieure " [MK 531] .
Et la pénombre de l’église catholique montre l’importance d’un éclairage succinct qui permet de couper l’auditoire du monde extérieur et de concentrer son attention sur ce qu’on lui fait voir [MK 532 ]
Tous les moyens doivent concourir à rendre la masse malléable.
Comme l’observe Le Bon :
L’individu plongé depuis quelque temps au sein d’une foule agissante tombe bientôt [...] dans un état particulier se rapprochant beaucoup de l’état de fascination de l’hypnotisé entre les mains de son hypnotiseur. […] Donc évanouissement de la personnalité consciente, prédominance de la personnalité inconsciente, orientation par voie de suggestion et de contagion des sentiments et des idées dans le même sens, […] tels sont les principaux caractères de l’individu en foule Il n’est plus lui-même, mais un automate que sa volonté est devenue impuissante à guider [ 13 -14 ]
Il n’est donc pas étonnant qu’Hitler fasse du meeting de masse, qu’il appelle meeting de lutte ( Kampfversammlung ) son arme de prédilection, ce que du reste il explique fort bien dans Mein Kampf :
MK 536 : La communauté qui se forme dans les grands meetings ne réconforte pas seulement l’individu isolé, elle crée aussi des liens et contribue à faire naître un esprit de corps […] Lorsque le participant, en quête de réponses, est emporté par le puissant effet de l’ivresse suggestive de trois ou quatre mille autres personnes, quand le succès manifeste et l’approbation de milliers d’autres lui confirment la justesse de la nouvelle doctrine et que pour la première fois s‘éveillent des doutes sur les convictions qu’il avait jusqu’alors – alors il succombe à son tour à l’influence magique de ce que nous appelons suggestion de masse.
Merci Le Bon ? Mais tout cela ne s’improvise pas et, surtout, il faut que tout concoure au même but. D’où :
Le septième commandement : le principe de cohérence ( Geschlossenheit )
Ce principe doit s’appliquer aussi bien au contenu de la propagande – le message qu’on veut faire passer - qu’à son organisation matérielle, meetings, défilés etc.
MK 203 : Aucune variation ne doit modifier le contenu du message que veut faire passer la propagande : elle doit au contraire conclure en affirmant la même chose. Certes le slogan doit faire l’objet d’éclairages différents, mais la fin doit toujours revenir au slogan lui-même. Ce n’est que ce cette manière que la propagande peut être homogène et cohérente.
Mais pareille pédagogie a pour conséquence que le militant prend pour argent comptant les informations et les jugements qu’on lui impose et n’est bientôt plus à même de percevoir la réalité existant en dehors du filet de critères et de valeurs tissé par la propagande. Quel que soit l’argument qu’on oppose à sa conviction et quelle que soit la complexité contradictoire des faits, toute considération doit en revenir au slogan. C’est pourquoi il est vain de discuter avec une personne ainsi fanatisée. L’interlocuteur qui ne l’est pas n’en retire qu’un sentiment de déprime devant la vanité de ses efforts. ( Voir le livre très éclairant de Gérald Bronner : La pensée extrême ).
En février 1932, après un discours particulièrement virulent de Goebbels, le député Kurt Schumacher, qui deviendra en 1946 président du SPD, répliquait :
Il est vain d’élever une protestation formelle contre les monstruosités que viennent de proférer messieurs Goebbels et Strasser. Tout cela fait partie de tout un système d’agitation et nous nous refusons à mener le combat à un tel niveau de bassesse morale et politique.[…]. L’agitation que mènent les nationaux-socialistes n’est qu’un appel permanent au salopard qui sommeille dans l’homme. [ Dte. Parlamentsdebatten 19-33 – FTB 60654, p. 182 ]
De toute façon, le fait que les mêmes mots n’ont plus le même sens – voir la " démocratie améliorée " de Goebbels – fait qu’on ne peut plus se comprendre, comme l’a finement analysé Viktor Klemperer dans son étude sur la langue du Troisième Reich, la LTI. Voir le passage donné dans les documents annexes sous le titre : le pouvoir des mots.
Le national-socialisme trouve dans le langage :
son outil de propagande à la fois le plus efficace, le plus manifeste et le plus secret [ ligne53 ]
Ainsi se met inévitablement en place le monolithisme idéologique qui caractérise tous les totalitarismes.
Lors de la création de son ministère de la propagande en mars 1933 Goebbels déclarera même :
Il faut que le peuple se mette à penser de façon homogène, à réagir de façon homogène et commence, dans la plus totale empathie, à se mettre à la disposition du gouvernement.
Avec le recours au terrorisme d’État, le résultat ne s’est pas fait longtemps attendre. Un an plus tard, un journaliste suisse écrivait dans le Journal de Bâle ( 19.4.34 ) :
L’État total ne connaît et ne permet qu’une opinion et ne peut même, logiquement, n’en tolérer qu’une seule et unique, c’est-à-dire l’opinion officielle qui est la sienne. Dans un tel État, il ne peut y avoir d’opposition. Conseils et critiques ne peuvent se justifier qui si leur sens est celui d’une critique d’approbation convaincue.
Ce que d’aucuns appelleront critique positive, comme les nazis, qui affirmaient dans leur programme de 1920 à propos des églises :
" Le parti en tant que tel défend le point de vue d’un christianisme positif, sans toutefois se lier à une confession religieuse précise " ( point 24 )
Et bientôt un autre totalitarisme montrera qu’était prophétique le mot de Nietzsche dans la préface de son Zarathoustra : Quiconque est d’un autre sentiment va de lui-même dans la maison des fous…
Mais ce même principe de cohérence de la propagande doit aussi s’appliquer sur le plan de l’organisation qui, avec le terrorisme, constitue en quelque sorte la sainte Trinité du totalitarisme. Les bagarres entre SA et communistes, dans la rue et dans les meetings de l’adversaire, sont allées en s’aggravant, ont fait de nombreuses victimes et ont entraîné en avril 1932 l’interdiction temporaire de la SA et de la SS ainsi que celle du port d’uniformes non officiels, mais sans grand succès, d’autant plus que cette violence physique était elle aussi voulue par le führer qui dit l’avoir découverte dans l’action des socialistes et de communistes :
MK 46 : L’importance de la terreur physique envers l’individu ou la masse ne me parut pas plus difficile à comprendre. La terreur sur le lieu de travail, à l’usine, dans le local de réunion et à l’occasion des manifestations de masse continuera à réussir aussi longtemps qu’elle ne se heurtera pas à une terreur de force équivalente.
La volonté organisée de la nation : affiche de Mjölnir s.d. source ?
Au fond, croix gammée dans un soleil.
Trois SA de profil, du plus vieux au plus jeune, qui lui est blessé.
Les cogneurs, dont on fait des martyrs comme Horst Wessel ( chant de la SA ).
Pas mort malgré l’interdiction – Affiche BAK s.d.
L’Allemand qui aime la liberté doit entrer dans la SA national-socialiste.
Salut hitlérien, uniforme et regard de fanatique.
En avril 32 sous Brüning, organisations paramilitaires et uniformes interdits, vu les dégâts.
Rétablis par Papen en juin.
SA sans uniforme - ZBA Dt terwache
Bien trouvé pour tourner l’interdiction et mettre les rieurs de son côté.
Autre possibilité : remplacer la chemise brune par une chemise blanche ( un au milieu )
Dans les meetings, SA et SS, judicieusement répartis dans la salle et postés aux endroits stratégiques ( près du disjoncteur général par exemple pour couper la lumière si une bagarre éclatait - brochure d’Himmler 1929 ) assurait le bon ordre et le bon déroulement de la réunion. Et si " débat " il y avait, il était soigneusement contrôlé. Hitler laissait le contradicteur s’exprimer, mais seulement " pour lui river son clou " ( 19.5.20 ).
MK 546/549 : Quand nous, nationaux-socialistes, faisions une réunion, c’est nous qui en étions les maîtres et personne d’autre. […] Nous disposions d’un service d’ordre strictement organisé, ce qui était la fonction première de la SA.
D’un autre côté, un rapport de la police de Munich note, dès 1925, que cette rigueur dans l’organisation faisait bon effet sur le public (voir documents annexes) :
Dans les rues, les spectateurs disaient en général qu’ils appréciaient l’ordre et la discipline qui régnaient dans le cortège, ainsi que l’atmosphère de joie et de fête qui s’y manifestait.
Pour en terminer avec la SA, il faut en souligner trois aspects complémentaires : sa première tâche est le maintien de l’ordre et la neutralisation des contradicteurs. La seconde est de créer un esprit de corps, non seulement par l’uniforme, mais par la formation d’une communauté fondée aussi sur la solidarité et l’aide sociale, préfiguration de laVolksgemeinschaft censée se substituer à la lutte des classes. Et la troisième est d’occuper le terrain en toute occasion et pour ce faire de pénétrer les divers champs d’activité de la vie sociale, dont le sport en premier lieu.
En voici quelques illustrations :
SA avec une chaise dans une bagarre– ZBA ?
SA Local de réunion – Fragen VI 217 Berlin 1932
SA Distribution de repas à plat unique– Longerich 132
Épluchage de patates – ZBA Dter
Cortège dans une petite ville
( Internet ? Ni lieu, ni date)
Députés nazis en uniforme de SA à Berlin en août 32
allant à une réunion au très sélect hôtel Kaiserhof
Championnat de ski – Tölz 1932 – ZB Dter
Défilé des cyclistes de la SA 1933 – ZBA Dter
SA Arrivée du cortège au congrès de Nuremberg 1933 – ZBA DTer
Conclusion
Pied de sapin de Noël - Bad.Würt. Landesmuseum Karlsruhe – Kat. Nazi-Kitsch
Et voilà le travail - équivalent de : da haben wir die Bescherung .
Mais le mot Bescherung désigne au sens propre le moment où on donne les cadeaux de Noël.
Certes, les causes de la montée du nazisme sont multiples : défaite de 1918, Traité de Versailles et ses conséquences, faiblesse politique de la démocratie de Weimar, dramatique montée du chômage après le krach de 1929, ( bref comme le dit Ebeharhd Jäckel, un véritable G.A.U : größter anzunehmender Unfall – le plus grave accident envisageable pour une centrale nucléaire). Tous éléments qui n’ont fait que rendre crédible l’agressive et intense propagande de Hitler, globalement soutenue par les milieux conservateurs et une partie du patronat allemand. (cf. La République de Weimar de Horst Möller )
Il n’en reste pas moins que le jugement sans appel qu’Hitler porte sur les méthodes de ses adversaires marxistes s’applique parfaitement aux siennes :
MK 44/47 : Elle [ la masse ] n’a pas plus conscience du terrorisme éhonté auquel on soumet son esprit que du scandaleux abus qu’on fait de sa liberté, étant donné qu’elle ne soupçonne en rien le caractère délirant de toute cette doctrine. […] Les résultats de cette subornation de l’homme ne permettent que de le qualifier de victime.
DOCUMENTS ANNEXES
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